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Quand la discrimination suscite l'indignation

Une affaire de discrimination parmi tant d'autres en France. Le Dr Rachid Zegdi, un des plus éminents spécialistes en chirurgie cardiovasculaire s'est vu refuser le poste de professeur des universités, sans raison légitime. L'affaire a été portée devant le Conseil d'État.

Quand la discrimination suscite l'indignation
Le Dr Rachid Zegdi lors d'une intervention cardio-vasculaire.

Le docteur Rachid Zegdi est français d’origine marocaine. Il est né dans le sud de Paris, à Port-Royal. Issu d’un milieu modeste, il travaille vaille que vaille pour réussir avec brio ses études de médecine. Il se spécialise dans la chirurgie cardiovasculaire puis devient maître de conférences titulaire à l’Université Paris V et praticien hospitalier dans le service de chirurgie cardiovasculaire de l'Hôpital européen Georges Pompidou où il exerce encore actuellement.

Il est à ce jour le seul Marocain de France à avoir fait des transplantations cardiaques, pulmonaires et cardiopulmonaires (il en compte des dizaines à son actif). Il est également reconnu comme expert mondial sur la réparation des valves cardiaques ou sur leur traitement par les nouvelles techniques non invasives. Il encadre de jeunes chercheurs au sein d’une grande institution française. Il est également cofondateur de la première et unique entreprise française (Cormove) développant une valve cardiaque percutanée.
Passionné par son métier, le docteur Rachid Zegdi effectue de multiples recherches dans le domaine de la chirurgie thoracique et cardiovasculaire et mène de multiples missions d’expertise auprès de l’Agence de biomédecine, depuis 2005. Il devient, conjointement avec un de ses confrères, le docteur Massimo, le premier maître de conférences des universités en chirurgie cardiovasculaire et thoracique en France (nomination en 2004). Il décroche plusieurs Prix scientifiques, dont celui du «Cardiologue de l’année» dans la catégorie chirurgie (2006).

Mais malgré son parcours brillant et ses états de service exemplaires, c’est le Dr Massimo M. qui est nommé professeur des universités, un an plus tard, tandis que le docteur Rachid Zegdi, lui, était maintenu «gentiment» à son poste. Ne se laissant pas décourager par cette injustice, le docteur Rachid Zegdi met tout en œuvre pour décrocher le poste de professeur des universités de Paris, qu’il brigue depuis 10 ans. Ayant largement tous les prérequis et conformément à la règlementation en vigueur, il se présente au concours de recrutement en 2013. Le poste était également convoité par le docteur Paul A., nommé maître de conférences cinq ans après lui.

Le 18 avril 2013, la sentence tombe ! Le Dr Zegdi est recalé pour «inaptitude». Sa demande pourtant légitime pour le poste de professeur des universités a été rejetée, sans justification aucune, par ses pairs du Conseil national des universités (dont il est membre depuis 2006). La décision du Conseil n’était apparemment pas justifiée et n’avait aucun caractère de légitimité dans la mesure où le Dr Zegdi pouvait se prévaloir du meilleur dossier universitaire et d’un travail de qualité, par ailleurs, félicité par les membres du jury. De plus, le Dr Zegdi avait à son actif 4 fois plus de publications que son confrère.

En raison des nombreuses «irrégularités» entourant la procédure et les conclusions de l’instance d’évaluation, une plainte a été déposée par le Dr Zegdi auprès du Conseil État. L’affaire est en cours d’instruction. Mais une fois de plus, le traitement du dossier se fait toujours attendre ! Aujourd’hui, le Dr Rachid Zegdi attend beaucoup de cette décision de justice ! Toutefois, son cas appelle une série de questions. Pourquoi a-t-on préféré Paul à Rachid ? Pourquoi une décision universitaire vient-elle contredire l’esprit d’un concours ? Le principe du mérite ne consiste-t-il pas à sélectionner le meilleur candidat ? Comment un service public de santé peut-il entériner des valeurs contraires aux valeurs républicaines que sont l’égalité et la justice ?
Le Conseil national des universités aurait pu qualifier les deux candidats. Mais il ne l’a pas fait ! S’il n’a pas retenu la candidature du docteur Rachid Zegdi, c’est donc, en toute connaissance de cause. Mais alors, pourquoi ? La réponse est peut-être contenue dans une autre question : que se serait-il passé si le Dr Rachid Zegdi avait été nommé professeur des universités ? Il aurait pu de ce fait prétendre au poste de chef de service dans un des plus grands centres de chirurgie cardiaque français, en plein cœur de Paris. Qu’un Rachid puisse diriger un prestigieux service de chirurgie cardiaque, dans un des hôpitaux les plus en vue du monde, cette idée a dû paraître insupportable à certains esprits conservateurs et obscurantistes. Le cas de Rachid Zegdi n’est malheureusement pas un cas isolé, dans la bonne vieille République française. Combien de Rachid, de Mohamed, de Hassan se sont vu refuser des postes qui leur revenaient de plein droit, au seul motif qu’ils n’étaient pas bien nés ? Combien d’hommes et de femmes, enfants de l’immigration, mais français depuis trois, voire quatre générations, sont encore marginalisés par le plafond de verre bloquant l’ascension sociale. La République française ne devrait-elle pas renouer avec ses valeurs de Liberté, d’égalité et de fraternité afin qu’un enfant d’immigré puisse croire encore en la France de demain ? 

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