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Rachid Belmokhtar fait un diagnostic sans complaisance l’école publique et promet une vision 2030 pour le secteur

Le ministre de l'Éducation nationale et de la formation professionnelle, Rachid Belmokhtar, a adopté un franc-parler plutôt inhabituel en abordant les défis posés à l’école publique lors de son intervention mardi dernier au forum de la MAP. Le responsable gouvernemental s’est attardé sur les dysfonctionnements et les carences relevés dans le secteur de l’éducation, avant de donner sa recette pour renforcer la qualité de l’enseignement et développer les performances de l’administration en vue d’asseoir une nouvelle offre pédagogique basée sur l’ouverture sur les principes universels et garantissant un enseignement de qualité à tous les citoyens de façon égale.

Rachid Belmokhtar fait un diagnostic sans complaisance l’école publique et promet une vision 2030 pour le secteur
Pour M. Belmokhtar, il faudra s’attaquer et au plus vite aux dysfonctionnements flagrants qui entachent la réputation de l’école publique.

Une nouvelle école capable de former des élèves alertes et critiques, voilà en gros l’objectif que se fixe le ministre de l’Éducation nationale, Rachid Belmokhtar, à l’horizon de 2030. Le responsable gouvernemental qui avait déjà été à la tête de ce département dans les années 90, semble être parfaitement au fait des insuffisances qui entravent le décollage du système éducatif et freinent son essor. «Il faut reconnaître que notre système éducatif primaire a échoué. Le plus grave problème de l’enseignement primaire est son incapacité à garantir à l’élève la possibilité de lire et d'écrire au cours des trois premières années. Une étude menée au niveau de Rabat a d’ailleurs montré que trois élèves sur 25 ne savent pas lire et écrire ni compter, alors qu’ils se trouvent à la troisième année du primaire. Cela démontre une seule chose, c’est que les fondements de l’enseignement sont défaillants», déplore-t-il.

Pour M. Belmokhtar, il n’est plus question de se voiler la face, car il faudra s’attaquer et au plus vite aux dysfonctionnements flagrants qui entachent la réputation de l’école publique. Le ministre met l’accent dans ce sens sur la non-adéquation des programmes, la mauvaise gouvernance des écoles ainsi que la démotivation des enseignants. Mais parmi tous ces chantiers, le ministre préfère donner la priorité à l’amélioration de l’offre pédagogique qui devra désormais reposer sur un échange interactif entre l’enseignant et l’élève et s’éloigner du recours abusif aux manuels et à l’apprentissage par cœur. «J’ai constaté que les enseignants “gavaient” les élèves inscrits à la première année du primaire avec trop de leçons et, finalement, ils ne comprennent rien et ne retiennent rien. Ils rencontrent de sérieux problèmes une fois arrivés au collège. Ces élèves ne parviennent pas à suivre les études et finissent par abandonner parce qu’ils sont dépassés», s’exclame-t-il.

Le ministre ne mâche pas ses mots, conscient de la lourdeur de la tâche qui lui incombe, il sait que la réforme ne sera pas facile et n’apportera ses premiers fruits que d’ici 10 à 15 ans. «La réforme ne pourra toutefois démarrer effectivement que si des solutions sont identifiées pour des problèmes urgents tels que la déperdition scolaire et l’échec de la pédagogie de l’enseignement».

Pour remédier donc aux carences relevées au niveau des programmes, le ministre souhaite s’orienter vers une méthode d’enseignement reposant en gros sur l’éducation cognitive. Cette méthode privilégie l’amélioration du fonctionnement intellectuel de l’élève et table sur l’augmentation de sa capacité d’apprentissage et plus largement sa possibilité d’adaptation. Un processus dont la mise en œuvre est très complexe et nécessite la réduction des heures de l’enseignement en vue d’intégrer des activités culturelles et parascolaires (peinture, musique…) de nature à stimuler l’intelligence de l’élève et développer sa créativité. «Dans ce cas, il ne s’agit plus pour l’enseignant de transmettre des connaissances toutes faites à l’élève, mais de l’encourager à aller chercher lui-même l’information. Le rôle de l’enseignant consistera à donner à l’apprenti les règles générales de pensée, les procédures intellectuelles et les processus d’acquisition et d’utilisation des connaissances», note le ministre.

L’objectif est certes ambitieux, mais demeure difficile à atteindre en l’absence d’une stratégie de requalification des ressources humaines. Des mesures sont donc prévues bientôt pour hisser le niveau des enseignants, parallèlement à la mise en place de nouveaux programmes au niveau des centres de formation, afin de consolider les acquis et développer la culture des nouveaux lauréats. En outre, un dispositif devra être programmé prochainement pour accompagner les nouveaux lauréats durant les premières années de travail. Ce dispositif s’appuie dans sa mise en œuvre sur l’implication des professeurs ayant accumulé de longues années d’expérience. «L’enseignement est un métier complexe et la formation à elle seule ne peut pas garantir la graduation de bons professeurs. Il faudra accompagner les formateurs en herbe qui devront être assistés par les anciens», indique M. Belmokhtar. La motivation de l’élément humain figure également parmi les priorités du ministre de l’Éducation qui compte toutefois s’attaquer en premier au problème des mutations. En effet, le département reçoit chaque année plus de 50.000 demandes de mutation.

Ce qui pose des problèmes à l’administration qui trouve du mal à gérer ce dossier. Ainsi, le refus des demandes déposées provoque des déceptions chez les enseignants candidats et déteint souvent sur leur rendement. «Nous ne pouvons pas satisfaire toutes les demandes et cela pose des problèmes de séparation familiale et de démotivation», indique le ministre. Le remède à long terme serait, selon le ministre, une régionalisation avancée qui s’appuiera sur la création de nouveaux centres de formation aux métiers de l’enseignement dans toutes les régions du Maroc afin d’éviter des drames familiaux. «L’enseignant sera dans ce cas affecté dans la région où il a été formé», s’exclame le ministre. Par ailleurs, d’autres points sont considérés comme prioritaires pour le chef de ce département. À commencer par la moralisation de l’école publique qui implique la lutte contre tous les comportements qui nuisent à l’image de l’école, notamment la violence.

Le ministre prévoit par ailleurs de renforcer l’enseignement des langues et des disciplines scientifiques, généraliser l’intégration des technologies de l’information et de communication et établir des passerelles entre l’enseignement général et la formation professionnelle. S’agissant de la vision 2030 en cours d’élaboration, elle repose selon le ministre sur un nouveau projet pédagogique qui promeut un accès équitable à l’enseignement pour tous les citoyens et garantit une formation de qualité basée sur les principes et les valeurs de la patrie. Ledit projet repose sur l’ouverture sur les principes universels et place le capital humain au cœur des priorités.

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