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Quant parents et enfants échangent leurs rôles

Brutale ou progressive, la perte d'autonomie d'une personne âgée peut bouleverser le schéma familial. Devenue dépendante, c'est désormais elle qui a besoin de ses enfants. Ainsi les rôles sont inversés amenant parfois bien involontairement les enfants à endosser le rôle de parents.

Quant parents et enfants échangent  leurs rôles
Les enfants sont involontairement poussés à endosser le rôle de parent.

Prendre en charge un parent âgé confronte les enfants à une foule de sentiments contradictoires qui les bouleversent et les déstabilisent. Et il est souvent difficile de trouver un juste équilibre. Votre parent a probablement conscience que ses capacités diminuent et ne l’accepte pas forcément. Lorsqu'il se «rebelle» et souhaite accomplir certaines tâches tout seul, laissez-lui l'espace pour le faire.

Vaincre son sentiment de culpabilité

Lorsque des enfants s’occupent de leur parent âgé, le terme d’aidant naturel est souvent utilisé pour les définir. Ce terme peut donner l’impression qu’il est logique et naturel de prendre soin de son parent. Dès lors, la culpabilité des enfants est régulièrement exprimée surtout s’ils n’ont pas la possibilité et/ou même l’envie de «veiller» sur leur parent vieillissant. Car, en effet, au-delà du «devoir à accomplir» et du respect de la personne âgée (surtout si elle est diminuée), s’occuper de son parent devrait pouvoir rester une source de plaisir et de gratification pour les enfants.
Néanmoins, cette idée est parfois difficile à accepter pour les familles qui estiment qu’elles «doivent bien cela à leur maman», qu’elles «tiendront le coup», qu’il n’y a «pas d’autres choix», qu’elles ont «promis de ne jamais placer leur parent en maison de repos». Les enfants oublient alors de tenir compte de leurs propres limites.
Même si personne n’ose le dire, s’occuper de ses parents alors que l’on mène une vie professionnelle active n’est pas de tout repos. Certains diront : «mais ils se sont occupés de nous lorsque nous étions enfants, ont changé nos couches, nous ont fait manger...» Certes, mais vous ne faisiez pas le même poids et vous langer ou vous porter dans les bras n’était pas aussi difficile qu’avec une personne âgée. Accompagner sa mère ou son père à aller faire des courses, s'occuper de ses papiers, prendre ses rendez-vous chez le médecin, c'est une chose. L'aider à faire sa toilette ou lui donner à manger, c'en est une autre. Si ces soins vous mettent mal à l'aise, l'un comme l'autre, si vous y percevez un aspect régressif, déléguez. Il n'y a aucune raison de culpabiliser. Gardez toujours à l'esprit que vous n'êtes pas un aidant professionnel. Il est normal que vous ne soyez pas à même de tout faire, tout gérer, tout assumer. «Lorsque mon père a eu une tumeur au cerveau, son état s’est rapidement dégradé. Il ne pouvait plus aller seul aux toilettes ni se laver. Il devenait paralysé au point de ne plus arriver à faire quoi que ce soit. Moi et mon frère n’avions d’autres choix que de nous en occuper. Pour sa toilette, nous devions impérativement être deux pour arriver à le soulever. En plus, notre salle de bain n’est pas grande, et nous disposons d’une douche. Il fallait que l’un le tienne debout et l’autre le savonne dans même pas un mètre carré. Et avec ce “poids mort” il nous arrivait de glisser et on a tous dû prendre des coups. Comme mon frère et moi travaillions, nous ne pouvions le changer que le soir et il restait parfois toute la journée avec ses excréments», se rappelle douloureusement Tarik.

Les maisons de repos

D’ailleurs, s’occuper des personnes âgées est un métier, ce sont les auxiliaires de vie. Se pose alors la question des aides professionnelles puis, parfois, d’un possible placement en maison de repos. Ce changement de vie est souvent vécu, de part et d’autre, comme un abandon, un échec… Et pourtant, pour bien prendre soin de son parent, il faut parfois accepter de passer la main… Et puis, les parents ressentent le mal-être de leurs enfants, ils sont bien évidemment conscients d'être un poids pour eux, même si ces derniers font preuve de mauvaise foi en affirmant le contraire. Vos parents aimeront probablement davantage avoir la visite de leur infirmière pour prendre le thé, voir de nouveaux visages... Cela ne veut pas dire qu'ils n'ont pas besoin de la présence de leurs enfants. Mais avoir son parent dans le cocon familial peut être source de tension dans le couple : vous n'avez plus les mêmes libertés et ça, vos parents le ressentent. C'est pourquoi nombre d'entre eux refusent de vivre avec leurs enfants, préférant rester chez eux, avec leurs propres règles, leur propre routine. Dans ce cas, difficile pour les enfants de faire la navette tous les jours, surtout si l'on n’est pas à côté. Ainsi, certains enfants font appel à des femmes de ménage, des aides-soignantes ou des infirmières pour s'occuper de leur parent durant leur absence. De plus, la religion impose le respect et le devoir de venir en aide aux parents et aux grands-parents. Seulement, les choses ont évolué et, avec le coût de la vie, il est devenu difficile d’imposer la charge des grands-parents aux enfants. Ainsi, il arrive parfois que des hommes et des femmes, démunis et n’ayant pas de famille, soient délaissés.
Mais il faut se rendre à l’évidence, chercher une maison de retraite au Maroc est un vrai parcours du combattant et une fois trouvée, on se rend vite compte qu’elles sont surtout destinées aux étrangers (recherche Google à l’appui).

Pourtant, la demande est réelle, les centres trop peu nombreux. Mais cela risquerait de devenir un problème pour les années à venir. En effet, la population marocaine est en train de vieillir. Selon le Haut Commissariat au Plan, l’effectif des personnes âgées de 60 ans et plus passerait de 2,7 millions en 2010 à 10,1 millions en 2050, année où il représenterait 24,5% de la population totale alors qu’il ne constituait que 7,2% et 8,1%, respectivement en 1960 et 2004. Et il faudra bien que quelqu’un pense à investir dans ce secteur puisque l’installation de maisons de retraite sera profitable aux femmes de ménage, aux infirmières ou encore au personnel des cuisines. Encore faut-il que les mentalités évoluent et que les Marocains ne perçoivent plus ces bâtiments comme des mouroirs et qu’ils ne s’y opposent pas. 

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