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Eco-Conseil : Vous venez de publier un livre sur le leadership de l'amour. Pourquoi avez-vous lié ces deux
notions ?
Emmanuel Toniutti : J’ai eu une demande en 2011 d’un client, la filiale française du groupe allemand «Allianz», qui a souhaité travailler sur la manière de devenir une entreprise aimée par ses clients et ses collaborateurs. J’ai alors commencé la recherche sur ce thème. L’amour est la seule chose qui peut nous sauver du désespoir, de l’angoisse et permet de donner du sens à nos valeurs. On retrouve cette dimension dans toutes les religions monothéistes. C’est l’axe le plus important de mon livre qui fait référence à l’amour dans la philosophie grecque, la culture latine et la religion. Ce livre appelle à accepter la différence de l’autre et à s’enrichir de cette différence. Un leader doit considérer la différence de ses collaborateurs, ses clients et ses partenaires et leur accorder reconnaissance et respect sans les manipuler.
Comment définissez-vous le leadership de l'amour dans ce livre ?
J’ai décrit le leadership de l’amour en quatre grands chapitres. Le premier fait la distinction entre le leader et le leader responsable. J’ai défini le leader comme celui qui a le pouvoir de contraindre les personnes à faire ce qu’elles ne font pas naturellement, alors que le leader responsable accompagne les autres pour les faire grandir. J’ai donné des exemples concrets nés dans les environnements internationaux dans lesquels je travaille. Le deuxième chapitre est sur le courage. L’angoisse qui se déclenche chez un leader sous stress parasite une décision responsable. J’ai décrit aussi les neuf peurs qui donnent naissance à neuf modèles de leadership. Le troisième chapitre est axé sur l’amour et le quatrième explique la méthode de mise en œuvre du leadership de l’amour : comment se prépare-t-on à s'accepter soi-même, à identifier ses points forts et faibles et aimer les autres ? Le leadership doit être courageux et amoureux.
Est-ce que le leadership de l’amour dévoile le côté humain du leader ?
Évidemment, avec ses forces, ses faiblesses, sa capacité à entrainer les autres, ses contraintes. Un leader doit essayer de s’approcher des meilleures décisions, pour qu'elles soient plus cohérentes avec les valeurs de l’entreprise. Le travail des leaderships n’est pas facile.
Est-ce que cette notion de leadership de l’amour est facilement intégrée par les dirigeants d’entreprises ?
Je pense que ce n’est pas le cas, mais certains y croient.
Au Maroc, je travaille par exemple avec Saham Assurance, Bymaro, Vidéorama. Je suis en charge de former tous les leaders monde du groupe Orange. On est encore au point de départ, parce que c’est une remise en question du modèle de leadership tel qu’on l’apprend dans les écoles.
Comment faites-vous pour convaincre les leaders de cette nouvelle vision ?
Je propose une démarche d’éthique et de leadership à appliquer en entreprise. Quand je parle à des personnes qui ont des valeurs humanistes, ils y adhèrent. Avec la crise actuelle, il y a un retour aux standards de bons sens.
Est-ce qu’il y a un retour sur investissement si on adopte ce modèle de leadership ?
Il y a un retour dans le sentiment d’appartenance des collaborateurs et aussi des commerciaux envers leurs clients. On voit dans ce modèle économique que ce n’est plus le marketing qui apporte le client, mais c’est le bouche à oreille. De même, l’image de l’entreprise devient de plus en plus forte. Les entreprises qui rentrent dans ce modèle communiquent très peu.
Comment peut-on savoir qu’une entreprise adhère au leadership de l’amour ?
Quand un comité de direction se respecte et les choses peuvent se dire dans le respect de chacun, même en cas de désaccord. On applique ce modèle de leadership quand on a mis en place des workshops de respect de la différence pour les managers et quand on met en place des décisions qui sont cohérentes avec les valeurs. L’énergie positive qu’on ressent dans une entreprise est aussi une preuve d’application de ce modèle. Il faut savoir que plus la structure est grande, plus le temps d’application est long.
In fine, quels sont les objectifs de cette nouvelle vision ?
Changer le monde des affaires, dire aux dirigeants que l’entreprise est faite pour servir les êtres humains et non pas pour une rentabilité ultra excessive. C’est un appel au retour aux valeurs humanistes fraternelles. C’est un plaidoyer pour que l’argent ne devienne pas une
obsession.
