Le Matin : Qu’attendez-vous de la sixième édition du Sommet d’Africités de Dakar ?
Allal Sekrouhi : Renforcer l’idée dans la culture africaine que la décentralisation est un processus irréversible et qu’il est de l’intérêt de tous de faire une véritable subsidiarité à travers la décentralisation. En mettant en œuvre le principe de subsidiarité, selon lequel la responsabilité d’une action publique, lorsqu’elle est nécessaire, doit être allouée à la plus petite entité capable de résoudre le problème, nous cherchons un niveau pertinent d’action publique. Pour consolider les vocations, les collectivités territoriales de base doivent répondre aux attentes des populations en matière de services de proximité sur un territoire circonscrit. L’organisation mise en place a eu pour objectif de renforcer les compétences des collectivités territoriales et, notamment, celles des communes qui symbolisent l’administration de proximité. La vocation du niveau province-préfecture est également porteuse de proximité et de vocation sociale. Un mot encore pour rappeler que l’architecture de notre décentralisation porte 1 503 communes urbaines et rurales, 75 préfectures et provinces, et 16 régions qui sont appelées a devenir dans le nouveau projet 12 régions.
Il y a un mot clef, compte tenu des disparités régionales, c’est celui de péréquation. Comment en tenez-vous compte ?
Il est au cœur du soubassement juridique des collectivités territoriales. Il faut rappeler que le mot péréquation trouve son origine dans le verbe «péréquater» qui veut dire chercher à compenser, en tout ou en partie, des inégalités de situation. Les territoires ne sont pas équilibrés, par exemple, en termes d’accès aux services de base. L’INDH travaille à l’échelle provinciale, selon la méthodologie d’approche, c’est le comité provincial qui fixe la programmation territoriale.
Les politiques des départements ministériels sociaux se déclinent au niveau des provinces. On voit donc que la province est au carrefour, une volonté de déconcentration, puisqu’elle est une circonscription territoriale administrative de l’État et dans le même temps, elle porte une politique de décentralisation. Il faut en même temps, au sein de cette même entité, avoir un rapport clair dans ce qui relève des deux.
Il y a un mot qui reviendra souvent dans les discours et les interventions à Dakar, c’est celui de la décentralisation. Pourriez-vous approfondir cette composante ?
À travers la décentralisation, qui est une composante de la gouvernance, on réalise trois objectifs principaux. Tout d’abord, l’efficacité des politiques publiques sur le plan territorial, qui permet d’éviter ou de réduire le gaspillage des ressources et des moyens. C’est aussi l’amélioration des services, des prestations aux populations et aux différents acteurs.
À travers l’intercommunalité, le groupement d’agglomérations, il y a la possibilité d’optimiser l’action des collectivités territoriales. Un des outils d’une bonne mise en œuvre de ce type de vocation serait la contractualisation entre l’État et la région, entre l’État et les métropoles pour donner à ces dernières un statut spécifique. Il y a une inflexion qui doit être remarquée. Malgré les dysfonctionnements, nous sommes sur un trend d’amélioration, d’efficience. Nous sommes d’accord sur les problèmes, on partage le diagnostic et les axes de réforme. On doit se mettre d’accord sur les modalités de mise en œuvre et le rythme de déclinaison. Un des points que nous partageons c’est l’impérieuse nécessité de former le capital humain. Quels profils faut-il former selon quel modèle, quels modules de formation ?
Il y a le projet de création de l’Académie africaine des collectivités locales ?
C’est un projet important. Quinze programmes prioritaires avaient été sélectionnés au Sommet Africités de Marrakech, dont celui de la création d’une Académie africaine des collectivités locales. Au cours de cette cinquième édition, le prix de la décentralisation a été attribué au Maroc pour les efforts accomplis ces cinquante dernières années en matière de gestion locale et de décentralisation. On souhaiterait justement placer le Maroc comme interlocuteur fiable sur l’expertise dans le domaine de la décentralisation pour l’Afrique. Le Maroc peut être, sur le plan de la formation, un partenaire stratégique, notamment en termes d’accréditations des centres de formation.
Nous avons aussi le projet de créer un observatoire de veille stratégique qui aura pour mission de réfléchir aux besoins de formation et de les anticiper, d’innover sur les nouveaux métiers et les outils de communication.
En termes d’amélioration des compétences, Mme Najat Zarrouk, gouverneur, directrice de la formation des cadres administratifs et techniques au ministère de l’Intérieur, n’a eu de cesse d’encourager le réseau des femmes élues locales d’Afrique qui s’étaient réunies en mars 2011 à Tanger pour leur premier forum. Les femmes élues locales d’Afrique veulent améliorer leurs compétences et leur formation pour mieux répondre aux attentes des populations.
