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Les inventeurs livrés à eux-mêmes

Les inventeurs, notamment individuels, restent souvent sans accompagnement et se trouvent en dehors de l’écosystème de l’innovation. Ils manquent cruellement de soutien à tous les niveaux : prototypage, valorisation de leurs inventions, financement, reconnaissance…
Et pas de solution en vue pour le moment.

Les inventeurs livrés à eux-mêmes
Les pouvoirs publics ne disposent d’aucune politique volontariste pour favoriser l’invention. PH. DR

Moteur rotatif rotor carré, générateur atmosphérique de l’eau potable, système de visiophonie mobile à travers les réseaux classiques, machine à laver presque sans eau, du biocarburant produit à partir de micro-algues marines… Quel est le point commun entre ces inventions ? Toutes sont l’oeuvre d’inventeurs marocains. Certaines ont même été exploitées aussi bien au Maroc qu’à l’international.

Alors que par le passé, on ne parlait des inventions que pour mettre en avant notre culture générale, notamment lors des compétitions dédiées à cet effet, aujourd’hui, on en parle de plus en plus comme une réalité bien de chez nous. Il est, en effet, plus courant de lire, d’écouter ou de voir dans les médias, y compris internationaux, des cas de Marocains qui ont mis au point des inventions, brevetées ou pas, qui arrivent à impressionner même sous d’autres cieux.

Cela est-il dû à une politique volontariste des pouvoirs publics pour libérer les énergies créatrices et favoriser l’invention ?
Certes, les pouvoirs publics ont mis en place une stratégie de l’innovation, créé des entités pour promouvoir l’innovation et l’invention (Iresen, Mascir, cités de l’innovation…), mais quand on est un inventeur individuel, on reste en dehors de tout ce circuit, on est pour ainsi dire livré à soi-même.

Que d’embûches !

«L’écosystème de l’innovation est en train de changer et de devenir de plus en plus favorable aux entreprises et aux universités et non aux inventeurs indépendants», déplore Amine Agzenay, président de l’Union des Inventeurs et Innovateurs Marocains.
Un inventeur ne trouve même pas de l’accompagnement pour valoriser son invention, prouver son utilité et son intérêt pour pouvoir accéder au financement bancaire. Les banques sont souvent frileuses devant ce genre de projet et cherchent de prime abord des garanties avant d’engager leur argent, témoignent les nombreux inventeurs que nous avons contactés.

Résultat : la route de l’inventeur est semé d’embûches et souvent quand on parle invention, on parle plus de problèmes que de réalisations. Des problèmes à tous les compartiments. Le président de l’Union des Inventeurs et Innovateurs Marocains les résument en quelques points : absence de fonds pour concevoir un prototype de qualité industrielle, protéger et breveter une invention à l’échelle internationale, absence de procédures et d’avantages pour permettre aux inventeurs de créer leurs propres entreprises, en valorisant leurs brevets d’invention. Amine Agzenay pointe également du doigt la frilosité des industriels qui ne font pas confiance aux inventeurs marocains et même quand un inventeur tente de prendre en charge lui-même l’exploitation industrielle de son invention, il ne trouve pas d’accompagnement en face. D’ailleurs, note-t-il, les inventeurs manquent souvent de culture entrepreneuriale, ce qui ne les prédisposent pas à se transformer en entrepreneurs.

Du reste, les inventeurs ne sont pas encouragés à participer aux salons et à en organiser.
Mais, par-dessus tout, c’est une politique nationale qui fait défaut, renchérit Lotfi Bennani, inventeur et directeur de l’ entreprise Innovatel. En effet, indique-t-il, l’invention et l’innovation sont confrontées au Maroc à l’inadaptation, voire l’absence de politique. Ce qui se manifeste notamment, souligne Bennani dans la nette faiblesse des ressources consacrées à l’invention et à la recherche-développement et le manque de structures à même d’assurer la promotion des résultats de recherche et développement et de l’invention.
Y a-t-il des solutions à l’horizon ? Quels sont les plans du département de l’Industrie ? Silence radio du côté du ministère. Quelle solution prône-t-on à l’Ompic (Office marocain de la propriété intellectuelle et commerciale ? Pas de réponse non plus malgré nos multiples sollicitations.

Place donc aux inventeurs eux-mêmes qui proposent des solutions. «Si nous voulons véritablement encourager l’invention et l’innovation, il nous faut d’abord nous tourner vers cet être créatif particulier. Il faut qu’il existe une politique de promotion de l’invention et de l’innovation qui prenne en compte l’inventeur comme élément central et qu’il y ait une synergie entre les actions des organismes gouvernementaux et celles des groupements ou des associations d’inventeurs. C’est ainsi que la société tirera le meilleur profit de l’activité inventive», martèle Bennani.

D’une manière plus explicite, le président de l’Union des Inventeurs et Innovateurs Marocains, qui compte une centaine de membres, appelle à la mise en œuvre d’une série de mesures. Il s’agit de créer des centres de prototypage dans les universités, faciliter les procédures pour créer une entreprise par les inventeurs et considérer le brevet comme une garantie pour accéder au crédit bancaire «sans intérêt».
Il appelle également à offrir une formation entrepreneuriale aux inventeurs qui veulent devenir entrepreneur et à encourager, en fournissant des fonds, les inventeurs à financer le prototypage.

Autres revendications de ce groupement des inventeurs : organisation d’un Salon de l’invention annuel pour les industriels et les hommes d’affaires intéressés par les innovations et d’un concours national avec un objectif clair : financer l’invention depuis l’idée jusqu’à la création d’entreprise, la publicité et la participation aux Salons.

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